Monsieur et Madame White vivaient dans l’appartement d’un quartier peu fortuné de Claytown. Si madame parvenait de par sa santé de fer à sustenter leur couple d’un salaire complet en tant qu’éducatrice dans une crèche, monsieur ne touchait qu’une dérisoire somme annuelle en compensation d’une infirmité physique qui l’empêchait de trouver tout emploi. Elle était née de la terre, lui de l’eau. Et c’est en toute connaissance de cause qu’elle épousa un fauché aquatique et handicapé depuis toujours. Ils en vivaient heureux au point de risquer un enfant. Après de nombreux essais infructueux malgré des médicaments adaptés, elle tomba enceinte. Et de cette union naquît un petit Elliott dont l’élément allait déterminer le coût de son entretien. Terre, ils seront soulagés. Eau, ils seront prudents.

Malheureusement, le petit montra dès son plus jeune âge l’attirance évidente qu’il avait pour l’eau, en commun avec son paternel. De plus, il fit preuve d’un retard inquiétant à l’école sur quelques sujets plutôt embarrassants. Là où ses camarades devenaient de plus en plus à l’aise avec les mots écrits, lui butait encore pour les lire, les confondait, et bégayait dans ses lectures. Une seule séance chez le docteur suffit à éclaircir le sujet : Il était dyslexique. À chaque fois qu’il posait ses yeux sur quelque chose d’écrit, des lettres s’inversaient. Des mots changeaient de forme, il lisait des choses à la place d’autres. Son père eut la patience de passer énormément de temps à lui apprendre à lire et à relire un seul mot pour être certain de le prononcer. Ils ne purent vaincre cette tare incurable, mais ils surent la surmonter. De toute sa vie, Elliott restera toujours en retard en français. Si la prononciation orale ne lui posait aucun problème car il réussissait à s’exprimer merveilleusement bien, l’écrit en revanche déclenchait chez lui une peur invraisemblable de la moquerie dont il a souvent été victime. Son cœur battait, il se concentrait et il stressait. Pour les contrôles, il était au moins trois fois plus long qu’un autre élève pour lire la question.

Il découvrit vers ses onze ans l’existence d’une aura donc les bienfaits restaient encore à découvrir. C’est un professeur spirituel qui le lui affirma. Et l’année suivante, cette aura se manifesta concrètement pour régénérer la plaie d’un camarade de classe. Lui si chahuté, il gagna en notoriété et les moqueries commencèrent à se calmer.

Il décida à seize ans de s’inscrire dans l’école militaire volante dont les publicités et la propagande avaient attiré son attention. Pour faire court, disons que la vision des gradés dans leur uniforme ne le laissait pas indifférent, et qu’il ne souhaitait pas faire sa vie dans cette ville où il risquait de devoir s’occuper encore de son père avec sa mère. Alors il s’engagea. Durant deux années il travailla dur pour finalement passer l’épreuve qui lui ouvrit pour de bon les portes vers l’aventure. Il devint une recrue !

L’esprit coopératif, l’obéissance et la loyauté, il connaissait mieux que quiconque. Il avait musclé son corps, il était aussi bon qu’un autre en sport et faisait partie de ces fiers soldats de l’eau aux bons muscles bien assez chatoyants pour prouver que leur élément n’avait rien de misérable. Il peinait sur les épreuves écrites à cause de sa dyslexie. Et dès son arrivée ici, il tomba amoureux. Un capitaine qui évoquait l’horreur à l’unanimité chez les recrues et même les soldats. Le genre d’homme qu’on évitait parce qu’il pouvait faire échouer un passage à lui tout seul. Mais Elliott, plutôt que de l’esquiver, ne pouvait s’empêcher de se porter volontaire à chaque fois. Parce que ce capitaine, c’était Mason Connor. Que l’aquatique était devenu complètement fou de son supérieur. Qu’importe que Mason semble détester tout le monde et le fasse comprendre dans les notes, Elliott avait eu le coup de foudre et souhaitait tant attirer son attention qu’il se montrait toujours à lui. Son approbation semblait plus importante que son grade. D’ailleurs, il ne comptait avoir son titre de soldat que le jour où Mason l’aura jugé ! Elliott était devenu totalement dévoué à ce capitaine.